Les Beltracchi vivaient sur un grand pied. Wolfgang est peintre et son travail se vendait très bien. L'argent rentrait à flots. Le hic, c'est que ses tableaux étaient vendus comme oeuvres de Derain, Ernst, Léger et al. Oui, il est faussaire. Pendant plus de vingt ans il a écoulé une centaine de tableaux, au moins. Sa femme, sa belle-soeur et un associé étaient ses complices. Galeristes, directeurs de maisons de vente, experts (ces historiens de l'art spécialisés dans tel ou tel artiste et dont l'authentification fait autorité) n'y ont vu goutte. Si, ici ou là, certains commençaient à avoir quelques soupçons il n'y a pas eu d'alerte générale à cause du cloisonnement et de l'extrême discrétion de ce milieu: tout le monde se connaît mais personne ne sait ce que sait ou fait l'autre. Surtout il faut éviter de se faire braconner 'sources' et acheteurs...Il a fallu des examens chimiques (surtout des pigments) pour établir la fausseté de certains tableaux. Lors d'un procès en 2011 Beltracchi a reconnu en avoir faussé une trentaine mais pour le reste il se tient coi, si tant est qu'il se souvienne de tout ce qu'il a produit. Il est certain qu'il y a encore beaucoup de 'Beltracchi' dans la nature: chez des marchands, dans des collections privées, même dans des musées. Il a sorti ses mémoires et on a parlé d'un film. Il se présente comme un 'filou', un antihéros populaire qui n'a fait que profiter de l'avidité et de la prétention du milieu artistique. Il est vrai que personne n'a été blessé, physiquement. Des comptes en banque, des carrières et des réputations ont été bien endommagés. Une de ses 'victimes' fut Werner Spies, un temps directeur du Musée National d'Art Moderne au Centre Pompidou, LE spécialiste de Max Ernst, qui a authentifié des tableaux de Beltracchi. Le faussaire est content de son coup mais il aurait certainement préféré ne pas avoir été découvert. Son but était de gagner de l'argent et non de ridiculiser l'establishment (même si leurs exploits ont dû déclencher l'hilarité chez la 'bande à Beltracchi'). Mais si Wolfgang n'a rien d'un Robin des Bois cette histoire a certainement quelque chose des 'Habits neufs de l'Empereur'. Ce livre se lit comme un roman mais tout est vrai. Fascinant de bout en bout.