Il naquit à Kiev en 1889. Très tôt orphelin il fut élevé par une tante maternelle dans une famille de petite noblesse, aisée et très respectable mais qui manquait de chaleur et d'affection pour ce petit garçon. Après des débuts prometteurs il perdit tout intérêt pour les études et commença à faire les quatre cents coups avec les autres 'cancres'. On dut le retirer du collège réservé pour la noblesse. Il n'avait aucune envie de devenir fonctionnaire, il voulait être artiste, chanteur, comédien. Enfant, il était fasciné par les peintures de la cathédrale Saint Vladimir et surtout par le choeur. S'il pouvait entrer dans la chorale de son collège? Adolescent il commença à fréquenter les milieux artistiques et à 18 ans il rompit tout lien avec sa famille et partit pour Moscou. Pendant 10 ans il se formait à son métier, vivant d'expédients, de petits boulots- un mode de vie 'bohème' conscient et assumé, forcé même, il fallait surtout 'épater les bourgeois'. Il lutta avec la cocaïnomanie. Enfin il eut du succès avec ses chansons et commença à gagner beaucoup d'argent. Vint la Révolution et au cours d'une tournée en Ukraine il quitta son pays, sur un coup de tête, paraît-il. Il allait passer 23 ans en exil. Il tout vu et rencontré tout le monde, il est, comme on dit, revenu de tout. Il évoque avec une fraîcheur poignante les rues, odeurs et bruits de son Kiev natal. Son humour est acerbe, parfois vis-à-vis de soi-même et il manie l'anecdote avec maestria. Il faut lire sa (brève) rencontre avec Stanislavski, ses 'invitations' chez le général blanc en pleine guerre civile, l'étrange proposition qu'on lui fit à Berlin en 1931, le concours de 'Miss' à Shanghai en 1942. Son public était essentiellement des Russes 'blancs' exilés après la Révolution mais à New York il eut un triomphe dans le milieu juif yiddishophone. Ces gens avaient fui les pogroms mais gardaient de l'amour pour la langue et la musiques russes... Il ne dit pas tout, bien sûr. Il est très discret au sujet de l'URSS, disant simplement qu'il n'avait pas encore fait son 'éducation politique' dans sa jeunesse. Il paraît que c'est grâce à la protection personnelle de Staline, qui était fan, qu'il put rentrer sans jamais être inquiété. Ses souvenirs sont d'une vivacité entraînante (dans une traduction fluide). Une vie extraordinaire à (re)découvrir d'urgence. Fascinant!