Dans ce nouvel opus, Jean-Marie Rouart nous livre une part de lui-même en relatant sa jeunesse d'adolescent triste qui rêve de gloire littéraire à travers la lecture de ses auteurs favoris (Musset, Chateaubriand,...) mais que ses échecs scolaire renvoient à lui-même. En relatant aussi son amour contrarié pour Solange, jeune bourgeoise téméraire, que nous retrouverons tout au long de cette auto-fiction et qui lui fera entrevoir aussi par le biais de sa sœur, un autre monde : celui des aristocrates fortunés. Jean d'Ormesson sera de ceux-là et bien des années plus tard deviendra le modèle et l'ami de l'auteur. Le parcours de Jean-Marie Rouart sera également au cours du temps, ponctué de rencontres avec les grands intellectuels de cette époque comme François Nourissier, Maurice Rheims ou Jean Guitton et aussi par de nombreuses conquêtes féminines. Notre académicien nous donne là un livre plein de sagesse et de nostalgie qui retrace à merveille le parcours d'un homme épris de culture, né au milieu du XXe siècle. Un très bon moment de lecture.

Allongée depuis plusieurs jours dans la plus petite chambre de son appartement, Hemda Horovitz, octogénaire et infirme, attend que la mort arrive. Pour passer le temps, elle se remémore les souvenirs de son enfance passée dans son kibboutz aux côtés d'un père autoritaire mais bienveillant et d'une mère totalement désintéressée par l'éducation de sa fille. Elle évoque son mariage avec un homme qu'elle n'a jamais aimé ainsi que la naissance de Dina, sa fille, qui coïncide funestement avec la mort de son père. Elle se confie, révélant ses difficultés à aimer ses enfants équitablement. Ces derniers passent de temps en temps lui rendre visite, s'installant à son chevet et confiant à son corps inanimé leurs nombreux émois. Lui, s'interroge sur sa vie de couple et se trouve sur le point de quitter sa femme ; Elle n'accepte pas l'éloignement de sa fille et désire un autre enfant mais son mari s'y oppose. Ils sont tous deux mal dans leur peau et cherchent, auprès de leur mère, l'origine de leur malheur. Shalev dépeint avec splendeur et éclat la vie de tout un chacun. Elle évoque les troubles, les questionnements, les difficultés et les attentes qui constituent l'être humain, et les met en scène dans un style d'une grande beauté. Elle songe à ce qui reste de nos vies lorsque l'on croit avoir tout perdu et montre qu'au contraire tout est toujours possible tant que justement, il y a de la vie.

Il est question d'Henri, ou plutôt de deux Henri, un oncle trop tôt disparu, puis un frère, oui un frère, handicapé, fragile. De Buster Keaton aussi, enfant de la balle, qu'on balançait - son père, les soirs de spectacle, tant qu'il était assez petit, ça faisait rire, ça, l'enfant-projectile, au cabaret -. Leurs trajets, leurs trajectoires, si similaires, si différents. Difficile d'en dire plus sans en dire trop : c'est un roman qui prend par enchantement. En un seul mot : beau. S'il se trouve qu'en plus on aime Buster Keaton et qu'on a vu et revu ses films, il y a là quelque chose de magique dans son évocation. Florence Seyvos nous le remet vivant.

Sacré Beigbeder ! Dans la veine du roman fiction/réalité décidément très répandue ces temps-ci, nous voici au plus près de Salinger, l'écrivain mythique américain dont bien des auteurs ont cherché à percer le secret de sa vie recluse. Beigbeder est de ceux-là qui a même cherché à lui rendre visite en 2007. De cette rencontre avortée, et puisant dans ce qu'il avait d'archives à sa disposition (très peu) son imagination fait largement le reste. D'après lui, l'histoire du couple Oona O'Neill/J.D. Salinger, au-delà du flirt de l'année 1940, est fondamentale dans la genèse du célébrissime roman L'Attrape-coeur. Mais c'est aussi l'occasion pour lui de nous conter son dernier amour ...sa propre histoire d'amour, comme un miroir à celle de Salinger...

Après la mort accidentelle de son fils, Ioan, sexagénaire, quitte tout et s'installe dans un coin reculé des Cévennes pour remonter des murs en pierres sèches. S'écarter du monde est sa façon de noyer son chagrin. Mais ce projet est rompu lorsqu'il reçoit un message de sa belle-fille lui faisant savoir que son petit-fils est parti à l'aventure, quelque part à Barcelone. Le grand-père décide alors de retrouver ce petit-fils qu'il connaît si peu. Dans des squats abritant les indignés et les marginaux de toutes parts, dans les ruelles obscures du bario Gotico, il finira par retrouver beaucoup plus que ce qu'il cherchait... Des pages lumineuses entre Sagrada Familia, cracheurs de feu, antiquaires dépositaires des secrets de la Guerre d'Espagne : une ode aux marginaux du monde entier...et pour finir, l'oeil complice d'un ange aux ailes d'or.