Avant de lire Le Fils de Lowry, il convient de commencer par Le Passeur. Dans un monde futur, les gens sont formatés, identiques, chaque minute de leur vie est réglée et contrôlée. Le but : éviter que les guerres et les conflits ne réapparaissent. Un territoire délimité, des fonctions définies, l'absence de météo et de saisons, le monde est programmé. Cependant, un homme détient la Mémoire de l'Humanité : il est le Dépositaire de la Mémoire. Son rôle est de guider les Sages dans leurs prises de décisions. À douze ans, c'est Jonas qui est choisi pour prendre la relève. Tout lui sera transmis par le Passeur. Ce savoir, il ne devra en parler à personne. Cette passation lui apportera des sentiments jusqu'alors inconnus : la joie, le rire, l'amour, mais aussi la peine et la douleur... Le monde doit-il en être privé ? Une magnifique dystopie, qui pose le problème du précédent : l'humanité apprend t-elle de ses erreurs ? Dans le cas contraire, quelle légitimité y a-t-il dans le contrôle des émotions et des sentiments des populations ?

Princeton, juin 1905 : de graves évènements surviennent. Disparitions, enlèvements, apparitions, quel mal hante les habitants ? Retraçons les faits : le jour de son mariage, Annabel Slade est enlevée, quoique certains aiment à penser qu'elle a suivi l'inconnu de son plein gré ! La petite communauté est sceptique, mais lorsque les politiciens, les directeurs d'université et autres personnalités notables commencent à être victimes de visions, ils sont formels : il semblerait que le diable soit bel et bien parmi eux. Joyce Carol Oates nous livre une fresque fantastique, un beau roman gotique.

Sur des airs du Parfum de Süskind, Jonathan Grimwood pose son intrigue au XVIIIème siècle. Jean-Charles D'Aumout est découvert en train de dévorer des scarabées. Il a cinq ans et ses parents, endettés, se sont laissés mourir de faim. Pris en charge par les Grands du Royaume, il intègrera L'Académie militaire où il se forgera des amitiés solides : de Emile, son ami d'enfance, à Charles, dont il épousera la soeur. Obsédé par la recherche du goût ultime, il testera toutes les recettes. L'art culinaire porté à son paroxysme, une simplicité dans sa manière de vivre, et une ascension sociale exceptionnelle, lui vaudront le respect de tous. Mais cela suffit-il à échapper à l'Histoire... Quand commence sa vie ? Quelle action détermine le cours des choses ? Au delà de la recherche du goût, Grimwood nous fait vivre, de Louis XIV à Louis XVI, le destin d'aristocrates dont le monde bascule.

Hélène Carrère d’Encausse, grande spécialiste de l’histoire de la Russie, entreprend ici de retracer l’histoire de toute la dynastie des Romanov. Depuis Michel Ier élu par le sobor pour mettre fin aux désordres qu’engendra la difficile succession d’Ivan le Terrible, jusqu’au tragique destin des derniers Romanov assassinés dans leur retraite de Sibérie en 1918, elle brosse les portraits des douze souverains, sans compter les usurpateurs. Cette histoire sanglante et passionnante est celle de l’impossible Russie, cet immense pays déchiré entre l’occidentalisation voulue par certains de ses monarques, et la culture paysanne populaire, faite d’orthodoxie et de tradition. Pour Carrère d’Encausse, les trois figures les plus importantes de la dynastie Romanov sont Pierre le Grand (1682-1725), fondateur de l’Etat et créateur de la Table des Rangs, Catherine II (1762-1796) qui permet la naissance de l’intelligentsia, opère le renversement des alliances dans l’Europe des Lumières et rédige la Grande Instruction, et enfin Alexandre II (1855-1881) qui abolit le servage, et crée en 1864 les zemstva, organes de représentation paysanne. Malgré ces réformes révolutionnaires, la Russie peine à s’inventer une culture nationale et à entrer dans le bal des nations européennes modernes ; et l’emporte alors la conviction que le pouvoir autocrate du tsar est d’origine divine, ce qui conduit à la fin des Romanov. Cette lecture passionnante n’est pas du tout à réserver aux spécialistes de la Russie, mais s’adresse à tous ceux qu’interpelle le sort de ce pays fascinant.

Pour comprendre cette personnalité trouble et maléfique, Emmanuel de Waresquiel a traqué la vérité dans d'innombrables documents originaux que nul n'avait vus avant lui. De Stockholm à Londres, des archives notariales aux bribes de papiers encore disponibles sur le ministère de la police générale, ce sont des centaines de pièces qui sont dévoilées et interprétées. De trouble et maléfique, Fouché apparaît finalement plus comme l'archétype originel d'un type politique contemporain en plein développement de nos jours et dans nos démocraties. Historien par excellence de l'Empire et de la Restauration, l'auteur s'emploie avec un exceptionnel talent littéraire à faire parler tous ces documents et à cerner son personnage. Fruit de huit années de travail, cette étourdissante biographie se lit comme un roman au long cours.