Suite de scènes relatant les moments ordinaires – la vie tour à tour quotidienne et fantomatique – d'une « héroïne » qui ne sera jamais nommée, Une femme de quelques vies renoue avec le grand espace narratif de la poésie de Jean Daive. Construit comme un récit éclaté dont l'intrigue resterait cachée, l'ouvrage accumule les données « objectives » : les gestes, les outils, les décors dans lesquels l'héroïne paraît prise, comme une eau limpide et gelée. Le paysage lui aussi est anonyme : on y pressent quelque chose du Grand Nord, des terres arides, une étendue désertique où « tout se fige / même la page promise au monde ». Mais l'énigme réside dans le cœur de cette femme qui semble avoir choisi un retrait volontaire, présente autant qu'absente au monde qui l'entoure, et dont les gestes simples et le sommeil hanté laissent entrevoir une ombre trouble, un indicible secret. Après la réédition en 2007 du Jeu des séries scéniques et de 1, 2, de la série non aperçue , (originellement parus en 1976), ce nouveau volume marque l'arrivée dans la collection Poésie/Flammarion d'un des plus singuliers poètes de sa génération.